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Aristide Maillol et Dina Vierny au Musée d'Art moderne de Collioure

 
 Le Musée d’Art Moderne de Collioure dédie du 3 juin au 8 octobre 2023 une exposition aux artistes qui ont résidé dans les Pyrénées-Orientales lors de la Seconde Guerre Mondiale. « Harmonie » d’Aristide Maillol et d’autres portraits de Dina Vierny réalisés par Maillol et Victor Brauner sont présentés dans cet évènement intitulé Front de mer, Canet-Collioure-Banyuls 1940. 
9 septembre 2023
Dina Vierny Vue de l’exposition « Front de mer » au Musée d’Art Moderne de Collioure du 3 juin au 8 octobre 2023 © Musée d’Art Moderne de Collioure
Dès 1940, de nombreux artistes se voient contraints à l’exile pour des raisons religieuses, politiques ou idéologiques. Les Pyrénées-Orientales, se trouvant près de la frontière avec l'Espagne, deviennent un point de passage pour de nombreux réfugiés fuyant le régime nazi et souhaitant émigrer aux Etats-Unis. De très nombreux artistes, écrivains, intellectuels et personnes persécutées par les régimes autoritaires sont ainsi passés par cette frontière du sud, et notamment par Banyuls, pour trouver refuge en Amérique.  

Collioure, Banyuls-sur-Mer et Canet ont été des lieux importants pour les Surréalistes pendant la période d’Occupation. La villa Le Crépuscule (ou Le Crépuscule de la Raison) à Canet-Plage, près de Perpignan, a été un lieu d’accueil pour ces nombreux artistes et intellectuels qui ont fui l'occupation en espérant rejoindre les Etats-Unis. Certains artistes notables tels que Victor Brauner, Remedios Varo et Benjamin Péret s’y sont installés ou à proximité.

Durant cette période de Guerre, Aristide Maillol quitte son atelier d’Île-de-France et se retire à Banyuls-sur-Mer, commune dont il est originaire. Il débute en 1940 l’œuvre Harmonie pour laquelle pose Dina Vierny. Cette sculpture est la dernière que réalise l’artiste avant son décès des suites d’un accident de voiture en 1947. L’œuvre emblématique est actuellement présentée dans l’exposition « Front de Mer ».	

Vue de l’exposition « Front de mer » au Musée d’Art Moderne de Collioure du 3 juin au 8 octobre 2023 © Musée d’Art Moderne de Collioure


«

J’ai dû passer à peu près une petite centaine de personnes envoyées par Bohn ou Fry ou même d’autres car je ne savais pas toujours qui était l’envoyeur. Je n’ai passé que pendant deux mois et demi, vous savez. […] Ensuite, la frontière a été beaucoup plus surveillée. Et puis surtout j’ai été arrêtée. (Dina Vierny)

»

 Un réseau de passage, mené par Varian Fry, s’organise depuis Marseille et permets aux intellectuels juifs de fuir la France et rejoindre les Etats-Unis. Dina Vierny, modèle de Maillol résidant chez lui, participe à ce réseau et fait traverser les Pyrénées grâce à sa robe rouge qui sert de signe de reconnaissance : « Oui, à la robe rouge. J’étais parfaitement consciente que c’était dangereux. Et très voyant. Mais j’avais confiance en, comment dire, en mon étoile ! Je faisais très attention. On marchait dans le plus grand silence. On ne parlait pas car, en montagne, la voix, même un murmure, peut porter très loin, faire des échos. Je ne parlais donc jamais avec les gens que je passais, ou à peine, et je ne connaissais pas leur identité. »

Maillol finit par s’apercevoir des activités de passeuse de sa muse. Il la questionne, et après quelques hésitations, elle lui raconte tout. Malgré son étonnement, il l’emmène sur le champ dans la montagne afin de lui montrer le meilleur chemin à emprunter pour regagner l’Espagne, et s’enquiert de la méthode de Dina pour être reconnue par les futurs exilés. Elle lui explique que c’est la robe rouge qui sert de signal, et sidéré, il la portraiture vêtue de cet habit dans une peinture qui est aujourd’hui exposée au Musée Maillol. 

Dans une lettre destinée à Dina Vierny datant du 5 mai 1965, Varian Fry revient sur ces années de résistance et termine sa missive sur ces mots : « C'est moi qui devrais être fier du fait que j'avais dans mon réseau un être humain tellement courageux et tellement habile que Dina Vierny. Et je le suis. »

Aristide Maillol, « Dina à la robe rouge », 1940, Huile sur toile, 57,5 x 49 cm

 Dina Vierny est donc au contact de ces intellectuels exilés dans le sud de la France. Au début de l’année 1942, elle accueille Victor Brauner dans une maison située non loin de celle de Maillol à Banyuls-sur-Mer. L’artiste, juif étranger résidant en France, ne peut quitter le territoire. Brauner réalise à ce moment des portraits de la muse, sur papier ou sur des galets, qui sont également présentés au Musée d’Art Moderne de Collioure. L’un des dessins, daté du 17 mai 1942, porte cette dédicace lourde de sens : « ce dessin pour Dina en souvenir de cette époque, ineffaçable en mon esprit, comme preuve d'amitié ». Une relation assez courte nait entre la muse et l’artiste. Elle soutient son travail en tentant de le faire exposer à la galerie Louis Carré et lui fait fréquemment parvenir de l’argent. L’exposition n’aboutit malheureusement jamais à cause de la situation politique, de l’appartenance au Surréalisme et de la judéité de l’artiste : « La Galerie Louis Carré prend le chemin de l'avant-garde. Il m'a écrit et parle de toi - moi encore plus il est dit que tu es un grand peintre poète et que tous les deux nous t'aiderons à être un peintre-Poète célèbre. Seulement comment envisager l'exposition chez lui pour les questions que tu sais. » (Dina Vierny à Victor Brauner, lettre du 26 novembre 1943).

L’exposition du Musée d’Art Moderne de Collioure replonge donc le visiteur dans cette vie méditerranéenne des années 40, et brasse un panorama artistique et historique de cette période de troubles où le monde de l’art tentait tant bien que mal de survivre et où certains acteurs tels que Dina Vierny se sont distingués par leurs actions.

Vue de l’exposition « Front de mer » au Musée d’Art Moderne de Collioure du 3 juin au 8 octobre 2023 © Musée d’Art Moderne de Collioure

Victor Brauner, « Portrait de Dina », 1942, Encre et aquarelle sur papier, 26.8 x 18.7 cm

 
 Un réseau de passage, mené par Varian Fry, s’organise depuis Marseille et permets aux intellectuels juifs de fuir la France et rejoindre les Etats-Unis. Dina Vierny, modèle de Maillol résidant chez lui, participe à ce réseau et fait traverser les Pyrénées grâce à sa robe rouge qui sert de signe de reconnaissance : « Oui, à la robe rouge. J’étais parfaitement consciente que c’était dangereux. Et très voyant. Mais j’avais confiance en, comment dire, en mon étoile ! Je faisais très attention. On marchait dans le plus grand silence. On ne parlait pas car, en montagne, la voix, même un murmure, peut porter très loin, faire des échos. Je ne parlais donc jamais avec les gens que je passais, ou à peine, et je ne connaissais pas leur identité. »

Maillol finit par s’apercevoir des activités de passeuse de sa muse. Il la questionne, et après quelques hésitations, elle lui raconte tout. Malgré son étonnement, il l’emmène sur le champ dans la montagne afin de lui montrer le meilleur chemin à emprunter pour regagner l’Espagne, et s’enquiert de la méthode de Dina pour être reconnue par les futurs exilés. Elle lui explique que c’est la robe rouge qui sert de signal, et sidéré, il la portraiture vêtue de cet habit dans une peinture qui est aujourd’hui exposée au Musée Maillol. 

Dans une lettre destinée à Dina Vierny datant du 5 mai 1965, Varian Fry revient sur ces années de résistance et termine sa missive sur ces mots : « C'est moi qui devrais être fier du fait que j'avais dans mon réseau un être humain tellement courageux et tellement habile que Dina Vierny. Et je le suis. »
Dina Vierny Vue de l’exposition « Front de mer » au Musée d’Art Moderne de Collioure du 3 juin au 8 octobre 2023 © Musée d’Art Moderne de Collioure

Aristide Maillol et Dina Vierny au Musée d'Art moderne de Collioure

9 septembre 2023
 
 Le Musée d’Art Moderne de Collioure dédie du 3 juin au 8 octobre 2023 une exposition aux artistes qui ont résidé dans les Pyrénées-Orientales lors de la Seconde Guerre Mondiale. « Harmonie » d’Aristide Maillol et d’autres portraits de Dina Vierny réalisés par Maillol et Victor Brauner sont présentés dans cet évènement intitulé Front de mer, Canet-Collioure-Banyuls 1940. 
Dès 1940, de nombreux artistes se voient contraints à l’exile pour des raisons religieuses, politiques ou idéologiques. Les Pyrénées-Orientales, se trouvant près de la frontière avec l'Espagne, deviennent un point de passage pour de nombreux réfugiés fuyant le régime nazi et souhaitant émigrer aux Etats-Unis. De très nombreux artistes, écrivains, intellectuels et personnes persécutées par les régimes autoritaires sont ainsi passés par cette frontière du sud, et notamment par Banyuls, pour trouver refuge en Amérique.  

Collioure, Banyuls-sur-Mer et Canet ont été des lieux importants pour les Surréalistes pendant la période d’Occupation. La villa Le Crépuscule (ou Le Crépuscule de la Raison) à Canet-Plage, près de Perpignan, a été un lieu d’accueil pour ces nombreux artistes et intellectuels qui ont fui l'occupation en espérant rejoindre les Etats-Unis. Certains artistes notables tels que Victor Brauner, Remedios Varo et Benjamin Péret s’y sont installés ou à proximité.

Durant cette période de Guerre, Aristide Maillol quitte son atelier d’Île-de-France et se retire à Banyuls-sur-Mer, commune dont il est originaire. Il débute en 1940 l’œuvre Harmonie pour laquelle pose Dina Vierny. Cette sculpture est la dernière que réalise l’artiste avant son décès des suites d’un accident de voiture en 1947. L’œuvre emblématique est actuellement présentée dans l’exposition « Front de Mer ».	

«

J’ai dû passer à peu près une petite centaine de personnes envoyées par Bohn ou Fry ou même d’autres car je ne savais pas toujours qui était l’envoyeur. Je n’ai passé que pendant deux mois et demi, vous savez. […] Ensuite, la frontière a été beaucoup plus surveillée. Et puis surtout j’ai été arrêtée. (Dina Vierny)

»

 Un réseau de passage, mené par Varian Fry, s’organise depuis Marseille et permets aux intellectuels juifs de fuir la France et rejoindre les Etats-Unis. Dina Vierny, modèle de Maillol résidant chez lui, participe à ce réseau et fait traverser les Pyrénées grâce à sa robe rouge qui sert de signe de reconnaissance : « Oui, à la robe rouge. J’étais parfaitement consciente que c’était dangereux. Et très voyant. Mais j’avais confiance en, comment dire, en mon étoile ! Je faisais très attention. On marchait dans le plus grand silence. On ne parlait pas car, en montagne, la voix, même un murmure, peut porter très loin, faire des échos. Je ne parlais donc jamais avec les gens que je passais, ou à peine, et je ne connaissais pas leur identité. »

Maillol finit par s’apercevoir des activités de passeuse de sa muse. Il la questionne, et après quelques hésitations, elle lui raconte tout. Malgré son étonnement, il l’emmène sur le champ dans la montagne afin de lui montrer le meilleur chemin à emprunter pour regagner l’Espagne, et s’enquiert de la méthode de Dina pour être reconnue par les futurs exilés. Elle lui explique que c’est la robe rouge qui sert de signal, et sidéré, il la portraiture vêtue de cet habit dans une peinture qui est aujourd’hui exposée au Musée Maillol. 

Dans une lettre destinée à Dina Vierny datant du 5 mai 1965, Varian Fry revient sur ces années de résistance et termine sa missive sur ces mots : « C'est moi qui devrais être fier du fait que j'avais dans mon réseau un être humain tellement courageux et tellement habile que Dina Vierny. Et je le suis. »

Aristide Maillol, « Dina à la robe rouge », 1940, Huile sur toile, 57,5 x 49 cm

 Dina Vierny est donc au contact de ces intellectuels exilés dans le sud de la France. Au début de l’année 1942, elle accueille Victor Brauner dans une maison située non loin de celle de Maillol à Banyuls-sur-Mer. L’artiste, juif étranger résidant en France, ne peut quitter le territoire. Brauner réalise à ce moment des portraits de la muse, sur papier ou sur des galets, qui sont également présentés au Musée d’Art Moderne de Collioure. L’un des dessins, daté du 17 mai 1942, porte cette dédicace lourde de sens : « ce dessin pour Dina en souvenir de cette époque, ineffaçable en mon esprit, comme preuve d'amitié ». Une relation assez courte nait entre la muse et l’artiste. Elle soutient son travail en tentant de le faire exposer à la galerie Louis Carré et lui fait fréquemment parvenir de l’argent. L’exposition n’aboutit malheureusement jamais à cause de la situation politique, de l’appartenance au Surréalisme et de la judéité de l’artiste : « La Galerie Louis Carré prend le chemin de l'avant-garde. Il m'a écrit et parle de toi - moi encore plus il est dit que tu es un grand peintre poète et que tous les deux nous t'aiderons à être un peintre-Poète célèbre. Seulement comment envisager l'exposition chez lui pour les questions que tu sais. » (Dina Vierny à Victor Brauner, lettre du 26 novembre 1943).

L’exposition du Musée d’Art Moderne de Collioure replonge donc le visiteur dans cette vie méditerranéenne des années 40, et brasse un panorama artistique et historique de cette période de troubles où le monde de l’art tentait tant bien que mal de survivre et où certains acteurs tels que Dina Vierny se sont distingués par leurs actions.

Vue de l’exposition « Front de mer » au Musée d’Art Moderne de Collioure du 3 juin au 8 octobre 2023 © Musée d’Art Moderne de Collioure

Victor Brauner, « Portrait de Dina », 1942, Encre et aquarelle sur papier, 26.8 x 18.7 cm

 

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