Du 20 juin au 31 Juillet, la Galerie Dina Vierny présente dans son nouvel espace du 53 rue de Seine « Still Waters Run Deep », une exposition de
Marcel·la Barceló .
Rassemblant un ensemble d’œuvres récentes, cette exposition explore la puissance évocatrice de l'eau à travers ses mythes et ses croyances. Paysages et corps liquéfiés, nymphes aquatiques et sirènes, pluies diluviennes et volcans sous-marins y cohabitent, invoquant à travers la notion d'ontologie humide un regard liquide sur le monde.
Marcel·la Barceló (née en 1992 à Palma de Majorque) est une peintre catalane installée à Paris. Son imaginaire, façonné par une appartenance géographique multiple – entre les îles Baléares, la France et le Japon – reflète une sensibilité influencée par ces territoires.
L’exposition tire son titre de la peinture éponyme « Still Waters Run Deep » qui représente une île-femme allongée à l'horizon d’une mer en apparence paisible. « Still Waters Run Deep » peut se traduire par le proverbe « Méfiez-vous de l’eau qui dort » ou encore « Les eaux calmes sont souvent les plus profondes ». Comme le souligne l'écrivaine Blandine Rinkel dans le texte du catalogue : « L’expression "Méfiez-vous de l’eau qui dort" semble avoir été inventée pour qualifier le travail de Marcel·la, et il suffit de la prononcer à voix haute pour sentir que tout pourrait être autrement, que le monde, tel qu’on le connaît, recèle d’énergies inemployées. Qu’est-ce qui grouille sous la surface ? »
L’eau occupe une place centrale dans l’univers de l’artiste. Plus qu'un simple motif, elle structure l'espace mental des peintures, devenant matière de métamorphoses. Forêts aquatiques, îles submergées ou récifs oniriques donnent au regardeur l'impression de flotter dans un espace en liquéfaction. Marcel·la Barceló compare d'ailleurs l'acte de peindre au mythe grec de la naissance de Vénus : « un chaos primaire, mélange de sang, de sperme et d'écume marine, duquel émerge une forme perceptible ».
Parmi les silhouettes récurrentes de ce monde flottant, des jeunes filles aux corps diaphanes et coulants surgissent du décor, des naïades dont on retrouve les noms dans les titres de certaines peintures : « Lorelei », « Cyané » ou encore « Léthé ». L'exploration de ces figures ambivalentes, qui voguent entre menace et séduction se prolonge avec « La Sirène (▼▲) », première grande sculpture de l’artiste, présentée en exclusivité dans le cadre de l’exposition, « créature androgyne, feu mâle contre eau femelle », ainsi que la décrit l'autrice Esther Teillard. Haute de deux mètres, cette sirène en bronze dressée tête en bas est inspirée de la pose de yoga sirsasana, des chauves-souris endormies et du Pendu du jeu de Tarot de Marseille.
Cette idée d'inversion imaginaire a également guidée Marcel·la Barceló pour la série des peintures de reflets, dans lesquelles l'image-miroir devient aussi réelle que sa source, et où ciel et mer s'inversent, suivant l'idée alchimique tirée de la « Table d'Émeraude ». « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut ». L'artiste décrit ce qui l'a poussée à travailler ce motif: « J'ai eu envie de regarder la terre depuis la mer, d'inonder le cadre du monde solide. J'aime formellement représenter cet amas de matière condensée, coincé entre deux étendues aqueuses de ciel et d'eau. Les îles sont comme des fragments de conscience jaillissant d'un océan dont les profondeurs seraient l'inconscient : depuis le rivage, notre lucidité s'y déforme en double flou. Notre reflet serait comme nos rêves et nos angoisses, le réel miroité s'y confondant avec l'invisible qui grouille sous l'eau ».
Loin des certitudes de la terre ferme, les œuvres de Marcel·la Barceló nous entraînent dans un imaginaire fluide, nous immergent dans l’aquarium de la nuit et nous rappellent, comme l'écrit Bachelard dans « L'Eau et les Rêves », que « c'est en se tenant assez longtemps à la surface irisée, que nous comprendrons le prix de la profondeur ».
L'exposition est accompagnée d'un catalogue comprenant des essais de Lucia Pesapane, Blandine Rinkel et Esther Teillard.
Expositions récentes : Terrada Art Complex ; Château La Coste ; Fondation Carmignac ; M.O.C.O. Panacée ; Villa Emerige.
Collections publiques : Fondation Louis Vuitton ; Château La Coste ; Fondation Carmignac ; Fondation d’Art Contemporain Daniel et Florence Guerlain ; Collection Emerige ; Ibiza Museum of Contemporary Art ; Fondazione Arte Scienza Videoinsight, Turin ; Xiao Museum, Shanghai.